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Une Mini Fastnet 2023 rebaptisée Slownet

600 milles de près dans la pétole pour le plus grand bonheur des pointus

Cette année pour la Mini Fastnet, il y avait 55 bateaux de série (dont 14 pointus) et 31 protos.

Le parcours est une boucle de 600 milles au départ de Douarnenez en passant par le sud de l’Angleterre et le Phare du Fastnet au sud de l’Irlande pour enfin revenir à Douarnenez. Habituellement, ce parcours dure environ 5 jours.

J’ai eu la chance d’être conviée à bord de Minimalist par sa skipper Mathilde.

L’AVANT-COURSE

Nous voilà donc à Douarnenez, je rencontre Mathilde deux jours avant le départ. Nous faisons les derniers préparatifs : analyse météo, préparation de nav, réglage du mât, etc. Les conditions de vent annoncées sont faibles et une bonne partie se fera au près. Denis, le directeur de course, est formel, il n’y aura pas de réduction de parcours, nous irons bien tourner le phare du Fastnet. Youpi !

LE DEPART

Dimanche 12 juin, c’est le départ. On rend les téléphones au PC Course. Quand nous quittons le ponton, je prends une grande bouffée d’air. J’attendais ce moment avec impatience, que ça fait du bien. Sourire jusqu’aux oreilles ! Soleil et petit vent sont au rendez-vous. Mathilde me propose de prendre la barre pour le départ. Yeah merci !

SORTIE DE LA BAIE DE DOUARNENEZ : TOUJOURS AUSSI MAGIQUE

Go vers la première marque de parcours en sortie de Baie de Douarnenez : la Basse Vieille en face du Cap de la Chêvre. On part sur la droite du plan d’eau pour anticiper la bascule de vent à venir. Passage de la première marque vers 17H30 en 37e position. On n’est pas loin du milieu de flotte, Minimalist est dans le game !

CHENAL DU FOUR A TATONS

Vers 20h30, on s’engage dans le chenal du Four, passage bien connu des marins, situé entre les Iles Molène et la côte Finistère. La brume s’est installée. La visibilité est réduite, le vent est faible, mais le courant lui est bien là et on va vite dans le chenal. La brume donne une ambiance un peu bizarre, un peu stressante mais en même temps c’est très palpitant. Se retrouver dans un coin à cailloux et courants comme celui-ci à la tombée de la nuit et dans la brume, qui plus est au milieu de 84 autres bateaux, c’est plutôt rigolo. Au taquet sur les waypoints et la carte papier. Les minis surgissent à quelques mètres à chaque fois avant les croisements au près. La concentration est à son maximum.

Nous voilà éjectées du Four vers 23H, les siestes vont pouvoir commencer. On prend aussi le temps de manger et se changer pour la nuit. Que c’est bon de reprendre ces petits rituels, j’adore ça.

TRAVERSEE DE LA MANCHE : ATTENTION LES CARGOS

En route vers notre prochain waypoint : le phare de Wolfrock au sud l’Angleterre, tout près des Iles Scilly. On va pouvoir dormir mais attention il faut tout de même passer le DST (Dispositif de Séparation du Traffic). Nous passons à côté et il faut jouer à slalomer entre les cargos. Encore une fois, on est au près, avec le vent de face. On joue avec les oscillations du vent pour choisir quand faire nos virements de bord. La vitesse est bonne, on barre beaucoup. 

LAND’S END

On arrive le lendemain soir lundi 13 juin au sud de l’Angleterre, on aperçoit la côte. Ça me rappelle ma qualif hors course, j’avais dû faire escale à Newlyn et je me souviens être très impressionnée à me demander comment j’allais trouver l’entrée d’un port au milieu de ces immenses falaises. Bref, le coucher de soleil est magnifique, on a retrouvé notre target Kirikou avec qui on se battait un peu au début mais on les avait perdus de vue, on pensait qu’ils s’étaient échappés. On longe Land’s End pour atteindre le coin sud-ouest de l’Angleterre et c’est seulement au petit matin du mardi 14 juin qu’on va enfin longer la côte ouest de l’Angleterre. Cette fois, on a le courant contre nous et le vent est quasi-absent. On peine à avancer, au début on fait presque du surplace. Puis c’est à celui qui s’approchera le plus des cailloux.

C’est une bataille de virements de bord le long de la côte anglaise avec quelques autres minis. Très rigolo ! Mais à un moment, je n’ai pas fait attention et je me suis pris un filet de pêche. Finalement, nous avons réussi à le dégager mais petite frayeur car je n’avais vraiment aucune envie de plonger sous le bateau si près des rochers.

LA MER CELTIQUE : DIRECTION IRLANDE

On va pouvoir se reposer car une longue traversée nous attend. 200 mn dans la pétole, ce n’est pas rien. Il faut choisir une stratégie mais vu les prévisions avant de partir, nous n’avons pas envie de miser sur un côté ou l’autre du plan d’eau. Il nous semble raisonnable de rester au plus proche de la route directe en jouant les oscillations du vent et ne pas prendre une option extrême.

On avance tranquillement sous gennaker aux côtés de Tartine avec qui on partagera aussi quelques heures de course. C’est très stimulant d’avoir ces bateaux autour avec qui on peut comparer nos vitesses. On est constamment en train de régler et déplacer les poids. Le fameux matossage si important en bateau. Avec Mathilde, on s’est dit qu’on allait m’inscrire au club des Matosseurs Anonymes à mon retour car c’était clairement une obsession pendant cette course.

Bref, on retraverse tranquillement la mer Celtique en espérant voir des baleines. Je n’en vois pas mais j’en rêve lors de mes siestes. Pour le rythme à bord, on alterne des siestes de 2h pendant la journée et plutôt 1h pendant la nuit. Et évidemment on ne se prive pas de réveiller l’autre si besoin de manœuvrer.

On passe de la 28e à la 14e position le mercredi 14 juin. On ne connaît pas notre position mais quand on check les bateaux à l’AIS, on voit surtout des bateaux récents qui naviguent bien d’habitude. Alors on se dit que c’est plutôt bon signe mais on ne s’emballe pas.

Le mercredi soir, on aperçoit les côtes irlandaises, c’est majestueux ! La progression vers le Fastnet est très lente et nous sommes encore une fois ultra concentrées pour ne pas laisser une miette de terrain à nos concurrents pendant la nuit du 13 au 14 juin, on a le couteau entres les dents.

Et le voilà, au lever du soleil, le Fastnet ! Ce phare que je n’avais vu qu’en photo, j’y suis enfin. Derrière mes lunettes de soleil, je verse une larme d’émotion car quand même ça fait quelque chose d’être ici.

Une personne tente de demander le classement à la VHF au bateau accompagnateur mouillé au pied du phare. Ils répondent qu’ils ne peuvent pas donner d’info précise mais qu’on est dans le premier tiers de la flotte. Quand on entend ça avec Mathilde, j’avoue qu’on est complètement euphoriques. Mais non ?! on se disait qu’on n’était pas trop mal, peut être milieu de flotte, ce qui aurait été déjà super en soi. Mais là, c’est au-delà de nos espérances. Et aujourd’hui je regarde la carto et je vois qu’après le phare on était 8e/55 ! Après cette belle nouvelle, on se dit qu’ile ne faut pas se réjouir trop vite, la route est encore longue. Mais quand même ça fait du bien et ça booste pour la suite.

DESCENTE VERS LE DST DE OUESSANT

Le vent est quasi absent, c’est la transition pour le nouveau vent de sud-est qui va arriver. On est monté avec le vent dans le nez, on va redescendre avec le vent dans le nez. Tandis que certains sont dépités par cette nouvelle, nous, on est plutôt contentes !

Quelques phoques sortent la tête de l’eau et nous regardent passer d’un air intrigué.

Allez c’est reparti pour une longue descente. Quand le vent rentre, on a l’impression d’être en train de régater en baie de Quiberon tellement les bateaux sont proches. C’est génial. 

Avant de partir, il y avait deux schémas météo possibles : 1) vent nord-ouest 2) vent sud-est puis rotation à l’est. Le sud-est étant là, il est possible que le vent tourne à gauche donc. Je ne suis quand même pas partisane de jouer l’option gauche car à autant de jours des prévisions, je trouve ça très risqué. On aimerait la jouer comme à la montée, en mode prudent proche de la route directe. Mais le souci, c’est que quasiment tous les bateaux partent à gauche (à droite sur la carte du coup). Dilemme. On n’a pas envie d’y aller mais en même temps on veut rester jouer avec les copains. Car à la fois c’est risqué de partir à gauche si jamais le vent ne tourne pas finalement. Mais c’est aussi risqué de laisser partir les copains car si jamais le vent tourne, ils vont nous mettre une sacrée distance. On discute beaucoup avec Mathilde de savoir quoi faire dans cette situation. On tente de faire un ou deux virements pour emmener la flotte avec nous mais ça ne prend pas. Zéro charisme.

C’est donc la journée du vendredi qu’on décide de revenir vers le sud. Mais attention, la météo est moins sympa. Le vent monte et il pleut toute la journée. Ces 15 nœuds de vent avec des rafales à 20 nous paraissent super forts après 5 jours de vent faible et mer plate. En réalité, ce n’est vraiment pas grand-chose mais on n’avait oublié ce que ça faisait ! Prise de ris dans la GV et solent. Une fois de plus, je me rends compte que ma veste n’est pas étanche. Je me suis fait avoir comme une bleue. La veille de partir, dans un souci de gain de poids et d’espace, j’ai enlevé salopette et veste de rechange en me disant que ça ne mouillerait pas. La blague puisque je me retrouve trempée. Le soir, le vent mollit à nouveau mais il fait si humide qu’on a froid. Je demande même à Mathilde si elle n’a pas une couverture de survie pour moi. La fatigue aidant, j’ai beaucoup de mal à me réchauffer.

On arrive au DST de Ouessant le samedi 17 juin en début d’après-midi. On fait définitivement une croix sur le barbeuc du samedi soir au Winches Club. Mais on se dit qu’on est quand même hyper bien ici. Il y a pour nous bien plus de croisements de cargos qu’à l’aller. C’est un peu chaud et il n’y en a même un qui s’est dérouté de quelques degrés pour que l’on n’ait pas à manœuvrer. Super sympa.

DST > RETOUR MAISON

Et voilà, c’est la dernière portion.

La fatigue se fait sentir mais la motivation est là.

Quelle joie de passer la ligne d’arrivée après 6 jours 20 heures et 50 minutes de course le dimanche 18 juin. On ne connait toujours pas notre classement mais quand on arrive dans le port, on s’aperçoit qu’il n’y a que quelques mâts de mini. 

Sur le ponton, la famille de Mathilde et des amis à elle sont venus nous accueillir avec croissants et bières. Un petit déj de ministes en somme. Géniale de voir ce comité de soutien.

On termine cette Mini Fastnet 2023 en 14e position, 3e pointu et 1er Pogo 2. Nous sommes très fières et heureuses de notre classement.

Ensuite, super accueil du winches club comme d’habitude avec le travail incroyable de ses bénévoles. Un grand merci de nous accueillir chaque année aussi bien !

En bref le bilan de la course ultra positif :

– Super entente avec Mathilde, aussi bien sur le fonctionnement en nav que les blagounettes

– Une trajectoire globalement plutôt propre

– Une bonne vitesse

– Bonne gestion du sommeil et de l’alimentation

– Des dauphins accompagnateurs avec beaucoup de conversations tous les jours

Pendant toute cette course, je me sentais à ma place, je n’avais pas envie d’être autre part qu’ici. Cela faisait longtemps que je n’avais pas ressenti cette sensation de bien-être et d’apaisement total.

Une grosse pensée pour Alice Lasseigne avec qui je devais initialement faire la course sur Minus mais qui s’est blessée peu avant le départ.

Un grand merci à Mathilde de m’avoir conviée sur Minimalist et de m’avoir fait confiance. Bravo à elle qui a été à fond toute la course et avec le sourire. On a bien rigolé et pris soin l’une de l’autre. Encore une belle rencontre !

Merci à la Classe Mini, au Winches Club, au CEMC, à Denis, aux bateaux accompagnateurs, aux photographes Manon et Simon et à tous les ministes ultra motivés. Merci à Kirikou et son équipage Léo et Greg avec qui on s’est bataillé pendant toute la course.

Un grand bravo à Quentin et Mickaël qui décrochent la première place du podium en série suivi de près par l’incroyable Ginto !

Hâte d’avoir l’occasion de retourner à nouveau sur une course mini, je suis décidément complètement accro à ce truc.

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